vendredi 26 octobre 2007

Mystérieux anonyme

Pour ceux qui ne liraient pas les commentaires, je tenais à rendre hommage ici aux mystérieux anonyme qui m'a laissé la dernière fois une contribution précieuse que voici.
Mais qui es-tu donc mystérieux anonyme ?
Le trésor du Baobab (Conte africain, Henri Gougaud, L’arbre aux trésors)
Un jour de grande chaleur, un lièvre fit halte dans l’ombre d’un baobab, s’assit sur son train et contemplant au loin la brousse bruissante sous le vent brûlant, il se sentit infiniment bien. "Baobab, pensa-t-il, comme ton ombre est fraîche et légère dans le brasier de midi !" Il leva le museau vers les branches puissantes. Les feuilles se mirent à frissonner d’aise, heureuses des pensées amicales qui montaient vers elles. Le lièvre rit, les voyant contentes. Il resta un moment béat, puis clignant de l’oeil et claquant de la langue, pris de malice joyeuse : « Certes ton ombre est bonne, dit-il. Assurément meilleure que ton fruit. Je ne veux pas médire, mais celui qui me pend au-dessus de la tête m’a tout l’air d’une outre d’eau tiède. Le baobab, dépité d’entendre ainsi douter de ses saveurs, après le compliment qui lui avait ouvert l’âme, se piqua au jeu. Il laissa tomber son fruit dans une touffe d’herbe. Le lièvre le flaira, le goûta, le trouva délicieux. Alors il le dévora, s’en pourlécha le museau, hocha la tête. Le grand arbre, impatient d’entendre son verdict, se retint de respirer. "Ton fruit est bon, admit le lièvre." Puis il sourit, repris par son allégresse taquine, et dit encore : "Assurément, il est meilleur que ton coeur. Pardonne ma franchise : ce coeur qui bat en toi me paraît plus dur qu’une pierre".Le baobab, entendant ces paroles, se sentit envahi par une émotion qu’il n’avait jamais connue. Offrir à ce petit être ses beautés les plus secrètes, Dieu du ciel, il le désirait, mais, tout à coup, quelle peur il avait de les dévoiler au grand jour ! Lentement, il entrouvrit son écorce. Alors apparurent des perles en colliers, des pagnes brodés, des sandales fines, des bijoux d’or. Toutes ces merveilles qui emplissaient le coeur du baobab se déversèrent à profusion devant le lièvre dont le museau frémit et les yeux s’éblouirent. "Merci, merci, tu es le meilleur et le plus bel arbre du monde," dit-il, riant comme un enfant comblé et ramassant fiévreusement le magnifique trésor.Il s’en revint chez lui, l’échine lourde de tous ces biens. Sa femme l’accueillit avec une joie bondissante. Elle déchargea à la hâte de son beau fardeau, revêtit pagnes et sandales, orna son cou de bijoux et sortit dans la brousse, impatiente de s’y faire admirer de ses compagnes. Elle rencontra une hyène. Cette charognarde, éblouie par les enviables richesses qui lui venaient devant, s’en fut aussitôt à la tanière du lièvre et lui demanda où il avait trouvé ces ornements superbes dont son épouse était vêtue. L’autre lui conta ce qu’il avait dit et fait, à l’ombre du baobab.La hyène y courut, les yeux allumés, avides des mêmes biens. Elle y joua le même jeu. Le baobab que la joie du lièvre avait grandement réjouie, à nouveau se plut à donner sa fraîcheur, puis la musique de son feuillage, puis la saveur de son fruit, enfin la beauté de son coeur. Mais, quand l’écorce se fendit, la hyène se jeta sur les merveilles comme sur une proie, et fouillant des griffes et des crocs les profondeurs du grand arbre pour en arracher plus encore, elle se mit à gronder : "Et, dans tes entrailles, qu’y a-t-il ? Je veux aussi dévorer tes entrailles ! Je veux tout de toi, jusqu’à tes racines ! Je veux tout, entends-tu ?"Le baobab, blessé, déchiré, pris d’effroi, aussitôt se referma sur ses trésors et la hyène insatisfaite et rageuse s’en retourna bredouille vers la forêt.Depuis ce jour, elle cherche désespérément d’illusoires jouissances dans les bêtes mortes qu’elle rencontre, sans jamais entendre la brise simple qui apaise l’esprit.Quant au baobab, il n’ouvre plus son coeur à personne. Il a peur. Il faut le comprendre : le mal qui lui fut fait est invisible, mais inguérissable.En vérité, le coeur des hommes est semblable à celui de cet arbre prodigieux : empli de richesses et de bienfaits. Pourquoi s’ouvre-t-il si petitement quand il s’ouvre ? De quelle hyène se souvient-il ?

23 oct. 2007 16:51:00

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mais qui es-tu donc mystérieux anonyme ?

Comme le disait Henri Gougaud : "Non point changer la vie, mais l’aider à éclore. Voilà pourquoi sont au monde ces récits parfois millénaires qui ont atteint à la gloire insurpassable des œuvres : l’anonymat. Car je ne suis pas l’auteur de ceux qui sont dans ce livre. Je n’ai fait que les raviver, les ranimer, les restaurer, comme d’autres restaurent de vieux châteaux. J’ignore qui en sont les premiers auteurs. D’ailleurs, qu’importe ? Ils sont au monde parce qu’ils sont nécessaires, comme l’air, comme la lumière du jour, comme les arbres. "

L’ARBRE D’AMOUR ET DE SAGESSE (Conte du monde entier, Henri Gougaud)

Sur la place d’un village africain, il y avait un arbre prodigieux. N'allez pas imaginer un arbre de cent mètres de haut. Cet arbre n'a que deux branches... Deux belles branches charpentières, comme deux bras ouverts, comme une invitation à la vie.

Plus personne ne connaît son âge dans le village. On se dit parfois qu'il est peut-être aussi vieux que la terre.
Les villageois ressentent une véritable adoration pour l'arbre qui trône sur leur place. Ils lui attribuent même certains pouvoirs.
Les femmes stériles viennent en secret auprès de lui, le supplier de leur accorder la grâce d’un enfant. Les hommes viennent auprès de lui pour obtenir des réponses à des questions inexprimables et inavouables.

Au pied de l'arbre, on trouve des offrandes de toutes sortes: guirlandes de fleurs, friandises, objets insolites... en remerciement pour toutes les prières exaucées.
C’est le lieu de tous les rendez-vous: Les oiseaux de passage, les enfants, les amoureux…

Sur ces deux branches, l’arbre donne des fruits sublimes, gros comme des papayes, dorés comme des mangues, juteux comme des ananas. Pourtant personne n’ose manger ces fruits, ni même les goûter.

Quand parfois un voyageur de passage s’approche d’un peu trop près de l'arbre, on vient lui annoncer cette étrange et vieille vérité. Sur une de ces deux branches, l’arbre donne des fruits empoisonnés qui donne la mort en quelques secondes, en quelques minutes à peine, à celui qui par mégarde ne peut résister à la tentation. Les fruits sur les deux branches se ressemblent parfaitement.
Une branche donne la vie, l’autre donne la mort.

La droite ou la gauche?

Or les villageois ont oublié depuis bien longtemps de quel coté sont les bons fruits et de quel coté sont les fruits empoisonnés…..

Cette année là, un printemps très sec, suivi d’un été trop chaud assèche la terre. La nature a soif, les arbres ont soif, les animaux ont soif, les points d’eaux se font de plus en plus rares. La région est touchée par la sécheresse. Les récoltes ont été désastreuses. Les réserves se sont vite épuisées. La sécheresse est associée à une famine. Les villageois ont faim. Seul l’arbre, sur la place du village reste imperturbable tel un patriarche, avec toujours autant de fruits sur ses deux branches que d’étoiles dans le ciel.


Les villageois affamés tournent autour de l’arbre. Ils ont redoublé de prières et d’offrandes. Ils ont interrogé le feuillage mais ils n’ont pas eu de réponse. Personne n’ose risquer de perdre la vie en choisissant un fruit sur une des deux branches. Pourtant, un jeune homme va prendre le risque, courageux et héroïque, pour aider ses amis à traverser cette période difficile. Tout le village est rassemblé en cercle autour de lui. Il se dirige vers l’arbre, vers la branche de droite. Il choisit un fruit, ferme les yeux, le porte à la bouche. Le souffle bienheureux, les Dieux sont avec lui.


Aussitôt les villageois se précipitent vers l’arbre et se gorgent de ces fruits sublimes qui comme par miracle repoussent aussitôt, dés qu’ils sont cueillis. Ils festoient pendant plusieurs jours . Puis ils commencent à regarder la branche de gauche avec un air de défi, un air de provocation. Ils se souviennent de leur peur et comment à cause d'elle, comme ils ont eu peur comme ils ont failli mourir de faim. Ils finissent par se dire que cette branche est nuisible, maléfique… il faut s’en débarrasser. La décision est prise a l’unanimité.
Les villageois scient la branche à ras du tronc avec une joie vengeresse.

Le lendemain les fruits de la branche de droite sont tous en train de pourrir par terre dans la poussière. L’arbre, amputé d’une de ses branches, n’offre plus au soleil du matin que des feuilles racornies. Les oiseaux le fuient. L’écorce se dessèche.
L’arbre est mort.